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De pére en fille

Ce billet s’inscrit dans le cadre de la contribution digitale à la Journée Internationale de la Femme Africaine qui depuis 2014 célèbre ses 1001 visages sur internet à la fois sur le site et les réseaux sociaux.  J’ai été invité à y participer en répondant à plusieurs entretiens.  Le thème de l’édition 2017 est la Transmission, ce que j’ai reçu en héritage et que j’aimerais transmettre à mon tour. Comme pour chaque collaborateur, toutes mes interviews sont disponibles sur le site de www.journeefemmeafricaine dans la partie consacrée aux collaborateurs au masculin, vous y trouverez entre autre la première parte du volet transmission dans laquelle je parle de mes origines et ce qu’on m’a transmis.

Voici maintenant ce que j’aimerais transmettre à mes filles si Dieu m’accorde d’en avoir.

Je me suis toujours considéré comme un homme de culture. Pour une soirée j’opte toujours pour une tenue qui reflète l’africanité. J’ai toujours eu un faible pour les documentaires  faisant la promotion de la culture africaine. Dans mon enfance, c’est avec assez de peine que je restais à la maison pendant la fête de paques lorsque mes cousines prenaient le chemin du village. Pâques ou «Pakinou» dans mon ethnie pour ceux qui ne le savent pas, c’est l’occasion propice pour les familles en pays baoulé de se rassembler et faire le point des problèmes familiaux (règlement de litiges sociaux, fonciers etc.) ; des récoltes, des événements heureux et malheureux survenus au sein des familles (naissances, décès, mariages, voyages, etc.). C’est aussi le lieu de retrouvailles entre ami(e)s, membres d’une même famille et surtout une occasion festive sans pareille dans l’année.

Je rêvais d’être proche de ma culture dont la racine se trouve pour moi dans nos villages. Le fait de ne pas connaître mon village paternel me met toujours mal à l’aise lorsque je croise des personnes de mon groupe ethnique qui me parlent  en Baoulé. Je trouve que c’est une honte de s’exprimer dans des langues étrangères et d’être incapables de faire quelques phrases dans nos langues vernaculaires. Bien que habitant en ville, j’ai essayé d’apprendre cette langue avec différentes personnes du même groupe ethnique. Ma force de persévérance à payer puisque je peux formuler quelques phrases en Baoulé ma langue paternelle et en Agni ma langue maternelle. Je reconnais qu’il y a encore un énorme travail de ma part pour une maîtrise parfaite. J’envie tellement ces personnes qui peuvent parler dans leurs langues, sans que les autres ne sachent de quel sujet ils causent. Je me souviens que je pleurais chaque fois que ma mère allait dans son village et qu’elle me laissait en ville.

Je rêvais du village, d’être près de ma culture, sur la terre de mes ancêtres, de mes origines. Je considérais que mon identité prenait sa source dans mon village, avec les miens. Je garde un merveilleux souvenir de ma première fois dans mon village maternelle Gnanmiessa (La main de Dieu) en Agni dans le département D’Aboisso. Même si la  circonstance ayant favorisée cette découverte était la guerre que traversait mon pays, j’en garde le côté positif. J’avais le sentiment d’être dans mon paradis. Dans chaque visage je me voyais, dans chaque couleur de peau je voyais la mienne. J’avais oublié la crise qui sévissait dans la capitale pour profiter des miens. J’ai tant appris auprès de mes arrières grands-parents qui ne me connaissaient pas, puisque je n’avais jamais mis les pieds auparavant au village, parce que mon père et ma mère croyaient aux pouvoirs mystiques. Je reconnais en tant qu’ africain, qu’il est très courant dans notre culture que des forces noires  opérent pour retarder l’étoile de certaines personnes ayant un avenir prometteur. De ce fait, je pardonnais à mes parents de m’avoir toujours éloigné du village.

Lorsque je passe dans une rue de Malaga en Espagne où je vis actuellement et que les gens m’interpellent par mon prénom Koffi, c’est un plaisir et c’est avec fierté que j’en explique le sens. Je dis toujours en souriant que cela sonne comme un café sans lait et que c’est la couleur de ma peau. Parfois, tout surpris, mon entourage me demande si c’est vraiment mon prénom ou si c’est juste une blague. Pour eux le nom résonne comme  café ou coffee en anglais. Cela m’importe peu. Je préfère  Koffi à Éric Innocent qui fait français que je ne suis pas d’ailleurs. Alors avoir un prénom africain me confère mon identité. Par ailleurs, dès que je peux, j’écoute la musique traditionnelle de ma tribu mais aussi des autres pays africains. Je me sens plus attiré par les musiques traditionnelles qui pour moi sont des héritages.

Si j’ai des filles, j’aimerais vraiment leur transmettre ma vision. Je n’aimerais pas reproduire l’exemple de mes parents en les éloignant du village. J’aimerai que mes filles sachent d’où je viens, mes origines, l’histoire de ma tribu. J’aimerais transmettre à mes filles les valeurs qui m’ont été inculqués. Ces valeurs qui ont fait de moi la personne que suis. Alors, je leur transmettrai cette fierté d’appartenir au continent africain. Il faudrait que mes filles se sentent fières d’appartenir au peuple Akan. En plus de cela, j’aurai le devoir les immerger en plein  dans la tradition Akan. C’est fondamental pour moi que mes filles soient des femmes qui allient tradition et modernité. Des femmes qui prennent plaisir à se rendre au village pendant les vacances ou la fête Pakinou. Des femmes qui parlent avec maestria le Baoulé et L’Agni. Je transmettrai à mes filles la fierté des tenues africaines avec une préférence pour les matières traditionnelles de notre région. Je serai un guide afin qu’elles prennent goût à entreprendre parce que c’est le garant d’une indépendance. Enfin, je souhaiterai, par-dessus tout qu’elles aient mon sens du partage, de l’amour du prochain et du respect des ainés. Et pourquoi pas la passion de l’écriture (rires). Je rêve de voir mes filles parler leurs langues, cuisiner des plats typiques du peuple Baoulé ou Agni. Des filles qui n’ont pas honte de dire aux autres, je m’appelle Aya ou Affoué des prénoms africains. Des filles qui ne sont complexées ni par la couleur de leur peau, ni par leur identité culturelle.

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